Ricordi primi – Souvenirs premiers (Sicile, jusqu’à l’été 1957)

Souvenirs personnels précis :

1) un photographe ambulant nous photographie, ma mère, mon frère et moi, sur la placette sur laquelle donne notre maison. Sans doute pour vouloir donner du pittoresque au portrait, le photographe me glisse une cigarette entre les doigts.

2) j’assiste, le soir, à l’arrestation de Jésus sur la Place de Delia (où se déroule une représentation de la Passion).

3) j’assiste, de jour, à l’arrivée de Jésus portant sa croix à l’église de la Croce. Jésus disparaît et est substitué par un Jésus en bois sur la croix (représentation de la Passion à Delia). Je peux assister à la scène car je suis assis sur les épaules de mon grand-père maternel.

4) sur la placette devant notre maison on brûle un monceau de paille (est-ce pour le 8 décembre, fête de l’Immaculée Conception — les bûchers appelés vamparotti ?). Idem à plusieurs carrefours. Les gens achètent de la paille pour la faire brûler.

5) la rumeur se répand qu’un électricien s’est fait électrocuter en travaillant sur l’éclairage public.

6) ma mère, qui avait perdu un bijou, le récupère chez une femme qui gardait dans une boîte des bijoux trouvés. Je revois cette femme ouvrir la boîte. Plus tard je saurai que la femme en question est la femme de Tano (Gaetano) Ferrante.

7) sur la Place de Delia, je suis dans le couloir d’un autocar. Je dois faire pipi. Mon père me fait descendre de l’autocar.

8) peut-être le même jour, sur la Place de Delia, je regarde la partie avant de l’autocar : avec son pare-brise en deux parties et l’énorme calandre, j’ai l’impression de voir une tête monstrueuse et elle me fait peur.

9) mon père était sans doute déjà parti en France car dans mon souvenir la pièce dans la pénombre semble vide (les meubles ont certainement déjà été vendus). C’est l’après-midi, il y a ma mère mon frère et moi. Ma mère propose qu’on fasse une sieste tous ensemble en se couchant sur une malle. Mais celle-ci n’est pas très large et à un moment donné en me retournant je tombe sur le sol. Ma mère découvre avec effroi par terre un morceau de bois avec un clou qui ressort, tout près d’où je suis tombé.

10) notre maison se résumait à une grande pièce (dammusu) au rez-de-chaussée. En y entrant, tout au fond sur la gauche il y avait un coin cuisine. Ma mère avait installé là le berceau balançoire (la naca) qu’elle utilisait pour mon petit frère. J’ai appris, bien plus tard, à l’unif, que naca était un mot d’origine grecque, datant peut-être même du temps de la Grande-Grèce.

11) je suis au milieu d’un groupe de femmes assises sur des chaises devant notre maison. Elles parlent et rient.

Bruxelles 29/08/2014

Illustration : Eglise de la « Croce » (Delia, Sicile) – Représentation de la Passion du Christ (fin des années 1960/début des années 1970)

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