L’histoire alternative (ou uchronie) (2/2)

Toutes ces versions alternatives de l’Histoire pourraient sembler vaines. Elles mettent le doigt cependant sur les aléas, les constantes, les briques constitutives des événements et récits historiques.

Surtout elles posent la question de la viabilité des embranchements uchroniques, et par conséquent explorent les cheminements du hasard et de la nécessité, voire de la finalité téléologique de l’Histoire, à savoir une Histoire perçue comme ayant une finalité précise et même, sur de larges plans, comme écrite d’avance.

Car on trouve dans le fil conducteur du réel des éléments lourds et des éléments aléatoires. En général, ces éléments lourds viennent au final conforter le fil événementiel de l’Histoire « réelle ».

En 1940, 1941 ou encore 1942 l’Allemagne aurait pu gagner la seconde guerre mondiale.
Dans les années successives, les rapports de force deviennent disproportionnés en faveur des Alliés (puissance industrielle, davantage de ressources en hommes et en matières premières, espaces géographiques plus vastes et hors d’atteinte militaire).

Seule, la possession de la bombe atomique, associée possiblement à un missile balistique (V3, V4 ?) aurait pu, par sa fonction disruptive, permettre le triomphe « réaliste » alternatif de l’Allemagne.

Ainsi en est-il aussi d’une guerre de Sécession américaine imaginée uchroniquement.
Les États du Sud (ou Confédérés) étaient structurellement en état d’infériorité face aux États du Nord (Unionistes).

Il suffit de souligner le contraste entre le Nord plus riche déjà industriel et le Sud globalement rural ou encore les disproportions démographiques entre les parties belligérantes.

Face à un groupe compact (y compris racialement) de 22 millions de Nordistes (population quasi totalement libre) se dressaient 5 millions de Sudistes qui devaient par ailleurs maintenir sous surveillance et maîtriser 4 millions d’esclaves noirs !

La victoire du Nord apparaît dès lors, dans la réalité comme quasiment inéluctable, indépendamment de la dimension morale relative à l’institution esclavagiste, souvent mise au premier plan dans ce conflit.

Le deus ex machina pouvant faire pencher la balance en faveur des Etats sudistes dans une réalité alternative aurait dû prendre la forme d’une intervention militaire européenne (France et Grande-Bretagne) venant acter la partition des Etats-Unis d’Amérique.

Certains éléments objectifs de rapports de force semblent donc incontournables dans la réalité. Cependant, des éléments aléatoires peuvent venir perturber et parfois bouleverser l’approche globale.

Dans l’Antiquité, qui aurait parié initialement sur le succès de l’expédition gréco-macédonienne lancée à l’assaut de l’Empire perse et le triomphe total d’Alexandre le Grand ?

Rumes 2/03/2025

Illustration : Les Etats-Unis d’Amérique pendant la Guerre de Sécession (1861-1865) : en couleur orange les 11 Etats confédérés sécessionnistes qui étaient opposés aux Etats du Nord restés dans l’Union

L’histoire alternative (ou uchronie) (1/2)

L’histoire alternative (ou uchronie) est un genre littéraire qui reconstruit le passé en prenant appui sur une évolution alternative de l’Histoire. A partir de cet embranchement alternatif, les faits deviennent fictifs, purement imaginaires, basés cependant sur une évaluation raisonnée et « réaliste » des interactions possibles entre événements et personnages.

On évalue ce qui aurait pu se produire et, au fil des modifications, on module les changements qui auraient affecté le cours des événements. D’une certaine manière, à travers l’uchronie on a affaire à la mise en œuvre, dans le tissu spatio-temporel de l’Histoire, d’une sorte d’effet papillon.

On joue alors avec les constituants du récit historique, en établissant d’une manière plus ou moins arbitraire mais néanmoins crédible des versions simulées de l’Histoire.

Les adeptes de ces reconstructions d’évènements fictifs ressemblent à des chimistes qui élaborent virtuellement de nouvelles formules. Pour mieux saisir la texture et les rouages de ce qu’on nomme le « réel ».

Une expérimentation, en somme. Qui permet d’explorer une réalité différente avec toutes ses conséquences en cascade.

Nombreux sont par conséquent les thèmes qui peuvent servir de matière à moudre à l’uchronie. Dans notre époque contemporaine, le sujet phare abordé par les adeptes des récits uchroniques est, assez logiquement, celui de la seconde guerre mondiale.
Que serait-il advenu si l’Allemagne et ses alliés de l’Axe avaient gagné la guerre ?

N’importe quelle période de l’Histoire peut cependant faire l’objet d’une vision uchronique.

Si Jules César n’avait pas été assassiné aux Ides de mars, aurait-il entrepris la conquête de la Germanie à revers, d’est en ouest, comme il en avait eu, semble-t-il, le projet ?

La Germanie conquise par les Romains se serait occidentalisée un millénaire plus tôt et serait devenue sans aucun doute un élément moteur de l’Empire romain voire un catalyseur et promoteur de l’expansion de l’Empire vers l’Ukraine, les plaines russes voire le Caucase.

Dans un monde pareillement uchronique, que serait-il advenu si Rome et la Chine étaient parvenues à établir un contact direct avec des frontières communes ? Aurait-on assisté à une coopération et une mondialisation généralisées avant l’heure ? A un conflit planétaire dans le monde connu d’alors ? A une anticipation dans l’Antiquité de la Guerre froide ?

Rumes 2/03/2025

Illustration : Jour J, « Les Russes sur la Lune ! » (paru en 2010)

Jour J est une série de bandes dessinées qui explore des événements historiques suivant une perspective uchronique, en imaginant des réalités qui auraient pu exister

Consommateurs/travailleurs de choc

La propagande soviétique relative au bonheur, aux lendemains qui chantent, tout cela on le retrouve dans notre propagande moderne constituée par la publicité.

Ce qui était promis par l’alignement sur l’idéologie et le volontarisme dynamique des travailleurs de choc dans les régimes soviétiques, est également promis en Occident mais ici par l’adoption d’une ligne de vie modelée par la consommation commerciale et le crédit.

Rumes 23/08/2009

Illustration : Cadillac (modèle Eldorado), 1953